Problème #5 – Dérèglement climatique


Les crypto-monnaies peuvent contribuer à tempérer le problème du dérèglement climatique. Pas de “capitalisme vert” ici, mais une remise en cause nécessaire d’une organisation économique dont la seule vocation est la croissance.


Pour bien nous accorder sur la signification des mots « capitalisme » et « monnaies-dettes »,
nous vous avons concocté ce quiz économique.


I – La croissance économique est-elle soutenable ?

Greta Thunberg déclarait en 2019 devant l’O.N.U. : « Des gens souffrent, des gens meurent, des écosystèmes entiers sont en train de s’effondrer, nous sommes au début d’une extinction de masse, mais tout ce que vous faîtes, c’est parler d’argent et d’une chimérique croissance économique perpétuelle ! Comment osez-vous ? ». Il semble en effet que l’Occident fonce tête baissée vers le désastre…

Notre infrastructure économique et politique s’articule autour d’une croissance perpétuelle parfaitement insoutenable.
Sources de la vidéo
« Pablo Servigne : penser l’effondrement de notre monde » (Mediapart, 2015), YouTube.
« Jancovici et Delphine Batho : Transitionnons donc ! – Sciences Po – 22/11/2021 » (Jean-Marc Jancovici), YouTube.
« Jean-Marc Jancovici et Philippe Bihouix : Croissance et Effondrement [EN DIRECT] » (Thinkerview, 2019), YouTube.
« FACE AU DÉSASTRE QUI VIENT : LE COMMUNISME DÉSIRABLE | FRÉDÉRIC LORDON, JULIEN THÉRY » (Le Media, 2021), YouTube.

Dans son livre « Tout peut changer », Naomi Klein explicite pourquoi aucune solution ne pourra venir de nos dirigeants, notamment à cause de l’industrie pétrolière et du système bancaire et financier. En cause, un « verrouillage socio-technique », à savoir que les stratégies économiques et techniques précédemment mises en place freinent toutes réformes, innovations, transitions à mettre en place.

Dit autrement, rien que par le fait qu’au quotidien, nous nous payons les uns les autres avec une monnaie-dettes, à savoir la monnaie de l’organisation économique capitaliste, nous sommes malgré nous “verrouillés” à poursuivre une croissance économique perpétuelle. En définitive, si l’argent dirige sensiblement le monde, alors pour changer la direction du monde, il faut changer l’argent.


II – Capitalisme = croissance perpétuelle ?

Comme vous le savez, plutôt que de laisser l’argent “dormir”, nous nous sommes organisés de façon à le prêter à intérêt, afin qu’il soit remis en circulation. L’argent n’est plus un simple intermédiaire des échanges, c’est aussi et surtout un capital qui doit rapporter des revenus. C’est ce qu’on appelle le capitalisme, qui se distingue par exemple des périodes où la religion interdisait le prêt à intérêts.

Notre suicidaire obsession pour la croissance économique découle de notre système monétaire :
la monnaie est aujourd’hui essentiellement utilisée comme un capital qui doit rapporter (et donc croître).
Sources de la vidéo
« Environnement, économie, effondrement : la quadrature du cercle ? – Pierre-Yves Longaretti » (Comprendre et Agir, 2017), YouTube.
« Qui crée l’argent? Et comment? – Heu?reka #6 » (Heu?reka, 2015), YouTube.

L’organisation économique capitaliste a été fondée sur le principe d’inciter les grandes fortunes à faire circuler leur épargne, en la rémunérant via les intérêts. Mais si l’argent doit faire des petits (i.e. les intérêts), alors les investissements doivent rencontrer le succès commercial attendu. Le capitalisme est de fait plus ou moins synonyme de matraquage publicitaire et de société de consommation.

C’est-à-dire que pour rémunérer sans cesse toujours plus d’épargne, une croissance économique perpétuelle est requise, et il faut soit vendre toujours plus de biens / services, soit vendre autant de biens / services mais à des prix chaque fois plus élevés (bonjour la spéculation). Puisque ce système s’est construit petit à petit, sans vision à long terme, il n’a en fait pas été conçu ni pensé pour être soutenable.


III – Capitalisme = dérèglement climatique ?

En très raccourci : qui dit capitalisme, dit croissance, dit produire toujours plus et qui dit produire toujours plus, dit augmentation des dégâts environnementaux. Bref, sortir d’un capitalisme destructeur demande de créer une infrastructure technique pouvant supporter une organisation économique alternative. Par conséquent, faire émerger un autre système monétaire est indispensable.

Maintenant, qu’est-ce qui distingue une monnaie-dettes, tel que l’euro (scriptural), d’une crypto-monnaie ? Intrinsèquement, ces deux monnaies ne sont rien de plus que des bits informatiques. En revanche, les crypto-monnaies peuvent être régies par des règles non-capitalistiques. La fable de la onzième rondelle illustre superbement ce changement de paradigme économique.

Lien pour télécharger cette fable en format PDF.

En adoptant les crypto-monnaies, la Société n’aurait plus à emprunter sa monnaie à de coûteux intermédiaires (figurés par l’Étranger dans la fable). Il y aurait alors de l’argent dans le pays, sans avoir eu à l’emprunter au préalable à une élite économique, qui exige en retour toujours plus de rendements, rendements eux-mêmes issus d’une croissance économique qui malmène l’environnement.


IV – Vers une nouvelle infrastructure économique ?

La croissance ponctuelle d’une activité telle que le recyclage n’est pas une mauvaise chose en soi. L’“ennemi” de l’environnement n’est donc pas la croissance, mais la croissance perpétuelle qui vient avec le capitalisme financier. Concrètement, l’“ennemi” de l’environnement est notre dépendance envers ceux qui créent ou détiennent la monnaie et qui nous la prêtent exclusivement dans un but lucratif.

On l’a vu, avec les crypto-monnaies, nous pouvons nous réapproprier la monnaie et la faire circuler différemment et ce, afin que l’économie soit davantage guidée par l’intérêt général que par la quête de profits des prêteurs. Il s’agit in fine de modérer le rôle des grandes fortunes et des banques dans le fonctionnement de l’économie, c’est-à-dire de repenser notre infrastructure économique.

Schématisation de différents systèmes économiques selon leur type d'organisation, à savoir centralisé (tous les liens rejoignent un centre), décentralisé (tous les liens se concentrent sur plusieurs noeuds) et distribué (il y a nettement plus de liens, le maillage est plus fin, car les liens peuvent se créer sans passer par un centre ou un noeud).
Un comité central alloue la monnaie de façon centralisée, les banques l’allouent de façon décentralisée.
Et si on passait à une allocation distribuée, plus démocratique ?
Certaines crypto-monnaies prévoient un centre d’émission (« premining »), certaines plusieurs (« mining »),
tandis que d’autres n’en prévoient aucun (« mutual credit » / « crypto-accounting »).

Notre manque d’imagination nous limite souvent à débattre entre le capitalisme et le communisme, comme si l’économie était condamnée à être essentiellement dirigée par le Marché (organisation décentralisée) ou par l’État (organisation centralisée). Pour autant, sur le plan technique, la refonte d’un système capitaliste vieux de plusieurs siècles semble plus que jamais à portée de mains.

Vous voici rendu(e) au terme de ce module #5, qui présente les crypto-monnaies comme des alliées de choix dans la construction d’une société post-capitalisme financier (où course aux profits, consommation et dérèglement climatique seraient tempérés). Une autre économie est possible.


Les crypto-monnaies sont hélas utilisées comme un moyen de spéculation plutôt qu’un moyen de paiement. Les crypto-technologies peuvent néanmoins poser les fondations d’une nouvelle organisation économique.

Découvrez maintenant comment rendre ces modules plus concrets en
passant de la théorie à la pratique (module #Bonus).
TUTORIELS



N.B. : Le capitalisme financier peut-il survivre sans croissance du P.I.B. ? ↓

Si l’organisation économique capitaliste se structure effectivement autour du besoin de faire fructifier l’épargne, de faire de l’argent avec de l’argent, vendre toujours plus de biens et services (ou autant mais à des prix supérieurs) n’est pas tout à fait indispensable pour atteindre cet objectif.

Nous l’avons vu dans le module #4, avec la généralisation des « quantitative easing », les capitalistes peuvent être rémunérés avec de l’argent créé dans ce but, à l’instar des dividendes records versés aux actionnaires du CAC 40 en 2021, malgré des profits en berne suite à la pandémie covid-19.

En 2021, le montant des dividendes perçus par les actionnaires du CAC 40 était supérieur aux profits réalisés par les entreprises du CAC 40. Elles ont donc reversé plus d’argent qu’elles n’en ont gagné.

En conclusion, le désir d’une croissance perpétuelle du P.I.B. est sans doute un vestige d’un capitalisme industriel, d’un capitalisme pré-« argent magique » qui en dépendait. Aujourd’hui, la croissance est probablement un “totem” permettant de justifier l’ordre établi, de prétendre que le capitalisme profite à tous.

Sources de la vidéo :
« COMMENT LE CAC 40 S’ENGRAISSE AVEC L’ARGENT PUBLIC » (Le Média, 2021), YouTube.
« CAC 40 : DIVIDENDES RECORDS, SCANDALE AUX AIDES D’ÉTAT ? » (Blast, 2021), YouTube.
+ https://multinationales.org/fr/enquetes/allo-bercy/allo-bercy-des-aides-publiques-massives-pour-le-cac40-sans-contrepartie
+ https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/11/30/derriere-ces-milliards-d-euros-d-argent-public-se-perennise-le-detournement-sans-condition-des-ressources-de-l-etat-au-profit-des-interets-prives_6061615_3232.html
« COVID : le nouveau stade de l’effondrement ? Alain Juillet (ex-DGSE) – Le Samedi Politique » (Chaîne officielle TVLibertés, 2021), YouTube.